Les ciments sulfo-alumineux

anhydrite

Structure cristalline de l’anhydrite

Les ciments sulfo-alumineux : une famille nombreuse
Les ciments sulfo-alumineux sont constitués d’un mélange de clinker sulfo-alumineux et de sulfate de calcium hydraté (gypse) ou non (anhydrite). Cette appellation recouvre de nombreuses compositions qui ont pour point commun la présence de sulfoaluminate de calcium.

Le ciment sulfo-alumineux alitique est caractérisé par la présence simultanée de ye’elimite et d’alite (C3S), mais sans bélite.

Le ciment Portland modifié à la ye’elimite est fabriqué avec un clinker de Portland auquel est mélangé de 5 à 20% de ye’elimite.
Ce ciment possède des temps de prise plus courts et de meilleures résistances à court terme qu’un ciment Portland.

Le ciment ye’elimitique est, lui, constitué d’un mélange de ye’elimite (15-50%), de sulfosilicate de calcium ou sulfopurrite et d’anhydrite, mais sans alite.

Les ciments sulfo-alumineux bélitiques dont la ye’elimite et la bélite sont les principaux constitutifs ne contiennent pas d’alite.

Un peu d’histoire
La ye’elimite a été observée pour la première fois en Israël à Har Ye’elim en Israël. Elle est aussi appelée composé de Klein ou kleinite,
du nom d’un chercheur américain qui, en collaboration avec Mehta, a étudié ses propriétés hydrauliques dans les années 60.
Les premiers ciments sulfo-alumineux bélitiques ont été développés en Russie et au Japon, mais leur production industrielle s’est développée en Chine dans les années 1970. La première formulation, désignée par CSA (Ciment Sulfo-Alumineux), est un mélange de ye’elimite, de bélite, de ferrite et d’anhydrite. La seconde formulation, plus riche en ferrite, a été développée  sous la dénomination de CFA (Ciment Ferro-Alumineux) au début des années 1980. C’est dans les années 1990 que se développe vraiment l’usage des ciments sulfo-alumineux bélitiques suite aux travaux menés en Chine sur leur hydratation et leurs applications.

Motifs  d’utilisation des ciments sulfo-alumineux bélitiques
En Chine ces ciments sont utilisés en fonction des propriétés suivantes :
– un durcissement rapide et une résistance au jeune âge très élevée (40MPa à 2 jours)
– une bonne résistance mécanique à long terme
– une faible alcalinité
– une faible perméabilité
– une durabilité éprouvée en environnent agressif (chlorures et sulfates)
– une insensibilité à de nombreux inhibiteurs de prise, notamment Pb, Zn…

Des précautions pour garantir la durabilité de ces ciments doivent être prises en fonction :
– du fort dégagement de chaleur qui accompagne l’hydratation (fissuration possible des structures massives)
– de la rapidité du temps de prise (problème de maniabilité)
– de la possibilité d’expansion à terme (génération de fissures)

En effet, c’est le dosage de la chaux qui commande la microstructure de l’ettringite. En présence d’hydroxyde de calcium, l’ettringite devient expansive et cette propriété est utilisée pour compenser des retraits ou pour créer une récontrainte. Formée en présence de peu de chaux, l’ettringite n’est pas expansive, mais contribue au développement rapide de la résistance au jeune âge.

C’est en utilisant ces propriétés que les ciments sulfo-alumineux sont utilisés en Chine pour la préfabrication d’éléments en béton ou la fabrication d’éléments précontraints (poutres, tuyaux…). Ils sont également utilisés pour le coulage de dalles de grandes dimensions et pour des bétonnages par temps froid.

Hors de Chine, les ciments sulfo-alumineux bélitiques sont utilisés pour les chapes et les mortiers auto-nivelants sans retrait, pour les bétons à très haute résistance au jeune âge ou pour les composites renforcés par des fibres de verre. C’est leur faible alcalinité qui les rend apte à cet usage.

Les ciments sulfo-alumineux sont également utilisés pour le conditionnement de déchets nucléaires. Voir le Zoom ci-dessous…

Enfin la fabrication de ces ciments consomme moins d’énergie que celle du ciment Portland (la température de cuisson est moindre) et émet moins de CO2 (cru moins riche en calcaire et consommation moindre d’énergie fossile).

Zoom : Les liants sulfo-alumineux et la stabilisation-solidification des déchets nucléaires

Les déchets résultant du traitement des effluents liquides peuvent présenter des concentrations élevées en borates B(OH)-4et en sulfates, SO2-4. Leur conditionnement dans une matrice silico-calcique est problématique. En effet, les uns, les borates peuvent perturber la prise du liant et les autres, les sulfates peuvent provoquer des gonflements et la fissuration du matériau durci.

L’hydratation des ciments sulfo-alumineux provoque la formation de monosulfoaluminate de calcium et d’ettringite. Ces hydrates sont connus pour admettre de nombreuses substitutions dans leur structure : ils sont donc capables d’intégrer borates et sulfates dans leur structure et présentent donc une alternative aux liants silico-calciques.

 

Cette propriété des liants sulfo-alumineux peut être appliquée au conditionnement d’autres déchets : métaux lourds ou déchets de chantiers contenant du plâtre.

Bibliographie
J. Péra, J. Ambroise : New applications of calcium sulfoaluminate cement. Cement and Concrete Research, vol. 34, n° 4, 2003. pp. 671-676
O. Odler. Special inorganic cements. E & F. N. Spon, 2000.