La norme américaine ASTM C125-07 donne la définition suivante d’une pouzzolane naturelle : « Les pouzzolanes sont des matériaux siliceux ou silico-alumineux, qui ne possèdent pas eux-mêmes pas de propriétés liantes mais qui, sous forme finement divisée et en présence d’humidité, réagissent chimiquement avec l’hydroxyde de calcium à température ordinaire pour former des composés possédant des propriétés liantes. »
Un matériau est donc dit pouzzolanique si, en présence d’eau, il présente la propriété de se combiner avec la chaux pour former un liant.
Puisque c’est le caractère pouzzolanique d’un matériau qui en fait une pouzzolane (soit naturelle, soit artificielle (6)), sont donc finalement rangés sous cette dénomination des matériaux qui n’ont aucune parenté géologique entre eux. La clé des pouzzolanes est donc la pouzzolanicité et c’est cette propriété que nous nous proposons d’examiner dans cet article, non sans la mettre immédiatement en rapport avec l’hydraulicité qui caractérise la prise du ciment Portland.
Réaction pouzzolanique
Gel de C-S-H
Les pouzzolanes naturelles contiennent de 60 à 85% de silice (SiO2) et d’alumine (Al2O3). En présence d’eau et de chaux, à des températures ordinaires, comme dit la norme, elles vont former des silicates de calcium hydratés, semblables à ceux produits par l’hydratation du silicate tricalcique (C3S) (C3A. SiO2), composé principal du ciment Portland.
Les réactions pouzzolanique et hydraulique peuvent s’écrire globalement comme suit :
CaO+SiO2+H2O —> CSH (réaction pouzzolanique)
3CaO.SiO2+H2O —> CSH+Ca(OH)2 (réaction d’hydratation du ciment Portland)
On constate donc que la réaction pouzzolanique consomme de l’hydroxyde de calcium ou Portlandite, Ca(OH)2, contrairement à l’hydratation du clinker qui en libère.
R. Dron (1) remarque que l’écriture simplifiée de la réaction pouzzolanique pourrait faire penser que des formes à haute cristallinité, le quartz, par exemple, seraient susceptibles de réagir avec la chaux. Ce n’est pas le cas.
Massazza (2) a montré que la réaction pouzzolanique ne se produit que lorsque la silice et l’alumine sont constitutives de phases vitreuses ou amorphes, à la seule exception des zéolites qui sont des minéraux cristallisés.
Portlandite
Produits de la réaction pouzzolanique
G. Malquori, dès 1960 (3) avait compilé les résultats de nombreuses études menées sur les produits de la réaction. Il recensait :
Silicate de calcium hydraté (CSH)
Aluminate tétracalcique hydraté (C4AH13)
Et, sous certaines conditions :
Gehlenite hydratée (C2 ASH8)
Ettringite (3CaO.AL2O3.3SO4Ca, 32H2O)
Ainsi que le monosulfo-aluminate (3CaO.AL2O3.CaSO4, 12H2O)
Roger Dron (1) résume, au moyen d’un diagramme du système CaO-Al2O3-SiO2-H2O, les aires de répartitions des produits de la réaction pouzzolanique.
Essais de pouzzolanicité…
Compte tenu du fait que la réaction pouzzolanique consomme de de l’hydroxyde de calcium, les méthodes chimiques généralement utilisées pour évaluer l’activité pouzzolanique d’un matériau consistent à déterminer la quantité de chaux fixée par ce matériau après un certain temps, ou à déterminer le taux de silice ou d’alumine (actives) solubilisées par un traitement approprié.
De manière générale, les paramètres influençant les réactions pouzzolaniques (4) sont la nature des phases actives et leurs proportions :
– la teneur en SiO2,
– le rapport chaux/pouzzolane dans le mélange,
– la durée de cure,
– la finesse de la pouzzolane,
– le rapport E/C du mélange,
– la température.
… et optimisation de la pouzzolanicité
De nombreuses études ont été effectuées pour chercher à optimiser l’activation des pouzzolanes naturelles par différentes méthodes:
– la calcination,
– le traitement à l’acide,
– l’addition d’alcalins dans le ciment contenant de la pouzzolane,
– l’augmentation de la température de cure (préfabrication),
– le broyage prolongé.
Ces deux dernières solutions sont les moins coûteuses.
D‘autres études (5) ont montré que l’utilisation d‘activateurs chimiques (CaCl2, NaCl, Na2SO4) au sein d‘un mélange pouzzolane – chaux permet améliorait la cinétique des réactions pouzzolaniques
Notes
1 L’activité pouzzolanique, Bulletin de Liaison des Laboratoires des Ponts et Chaussées, n° 93, 1978, pp. 66-69
2 Chemistry of pozzolanic additions and mixed cements, in 6th International Congress on the Chemistry of Cement, Mocow, September 1974
3 Malquori G., Portland-Pozzolan Cement, International Symposium on the Chemistry of Cement, 4, Washington, D.C, Paper VIII-3, 2, p983-1006, 1960
4 Shi C., An overview on the activation of reactivity of natural pozzolans, Canadian journal of civil engineering, vol. 28(5), p778-786, 2001
5 Shi C., Day RL., Pozzolanic reaction in the presence of chemical activators. Part I. Reaction Kinetics, Cement and Concrete Research, Vol.30, pp. 51-58, 1999.
6 Dans sa thèse sur l’ Estimation de l’activité pouzzolanique, recherche d’un essai (1975), Raymond Largent écrit que la distinction entre pouzzolane naturelle et pouzzolane artificielle n’est pas nette, les secondes étant des pouzzolanes qui ne manifestent leur comportement pouzzolanique qu’après un traitement thermique.
Il reprend ce qu’avançait d’emblée Vicat (songeant à l’argile calcinée) dès 1818 dans Recherches expérimentales sur les chaux de construction, les bétons et les mortiers ordinaires : « Nous comprenons sous ce nom de pouzzolane non seulement les produits volcaniques de l’Italie et de la France, mais aussi toutes les substances analogues que l’on modifie par le feu des fourneaux, et auxquelles on parvient à donner, à très peu près, les qualités de pouzzolanes naturelles ».