La substitution aveugle germe de désordres pour l’avenir : l’exemple de la substitution au 19e siècle

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Cathédrale Notre-Dame de Paris en cours de restauration (1845). Archives photographiques (Médiathèque de l’architecture et du patrimoine) © CMN

Le principe énoncé par le Viollet-Le-Duc dans son Rapport de 1849 sur la restauration, selon lequel « Tous les matériaux enlevés seront toujours remplacés par des matériaux de même nature, de même forme, et mis en œuvre suivant les procédés primitivement employés 1 » a connu, au XIXe siècle, des entorses commises par Viollet-Le-Duc lui-même, qui, ailleurs précise « Beaucoup d’édifices ne menacent ruine que par la faiblesse ou la qualité médiocre des matériaux employés. Toute pierre à enlever doit donc être remplacée par une pierre d’une qualité supérieure 2 ».
La qualité supérieure supposée, au XIXe siècle, est liée à la dureté voulue de la pierre de substitution. Mais cette dureté n’a rien à voir avec la durabilité. Au contraire, le recul historique a montré que les pierres plus tendres qui entourent une pierre dure de remplacement se sont altérées, en maints endroits (Cathédrale de Paris, par exemple), plus rapidement que les autres pierres. Les phénomènes d’incompatibilité, inconnus au XIXe siècle, sont aujourd’hui explorés scientifiquement (porosité, capillarité, transfert et évaporation) si bien que la durabilité d’une pierre de remplacement, loin d’être une donnée a priori, est reconnue en fonction de sa destination et de son environnement dans l’édifice.  Cette connaissance scientifique recoupe et confirme souvent les choix des bâtisseurs anciens dont l’art était de mettre la bonne pierre au bon endroit.

1 Eugène Viollet-le-Duc et Prosper Mérimée. Instructions pour la conservation, l’entretien et la restauration des édifices diocésains, et particulièrement des cathédrales, 1849.

2 Eugène Viollet-le-Duc. Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle – Tome 8, article Restauration