Ciments courants, ciments spéciaux : généalogie d’une appellation

Historique
La norme  NF EN197-1 de juin 2000 définit les caractéristiques des ciments courants. Son avant propos décrit le processus d’élaboration normative de ce qu’on appelle un ciment courant. Cette définition, avant que les produits soient normalisés à l’échelle européenne,  n’était au fond pas évidente.

Cet avant propos est  instructif. En effet, dans le cadre de la préparation de cette norme par le CEN, une enquête, dans les années 70, recensait une vingtaine de sortes de ciments en Europe occidentale, qui, tous, avaient fait l’objet d’un travail normatif national. Le projet du CEN était d’inclure dans la norme européenne tous les ciments pouvant être utilisés dans n’importe quel béton armé ou non armé, ciments connus et éprouvés, dit l’avant-propos, pour avoir été utilisés depuis longtemps dans leurs pays respectifs. Les ciments plus locaux devaient, eux, continuer d’être traités par leurs normes nationales. Ce projet ne vit pas le jour.

Une seconde enquête menée dans les années 90 recensait encore 50 autres ciments normalisés au niveau national dans divers pays. Compte tenu du grand nombre de ciments à prendre en compte,  le CEN décide de traiter séparément les ciments dits courants des ciments spéciaux, c’est-à-dire des ciments qui présentent des propriétés supplémentaires ou particulières.

La norme NF EN 197-1 inclut donc sous le vocable de courants tous les ciments qualifiés de traditionnels et d’éprouvés par les organismes nationaux de normalisation. La notion même de ciment courant a évolué depuis la parution de la norme NF P15-301 de 1981 (Zoom sur l’évolution de la désignation normative des ciments courants). Les ciments qui n’entrent pas dans cette nomenclature de la norme NF EN 197-1  sont donc… des ciments spéciaux. L’avant propos conclut que les ciments courants dotés de propriétés particulières, de même que les ciments ayant d’autres processus de durcissement que l’hydratation des silicates de calcium seront traités dans d’autres parties de la présente norme européenne ou dans d’autres normes européennes.

Nous n’abordons dans cette lettre d’information que les ciments spéciaux couverts par une norme ; mais nous signalons ici que différents « ciments courants aux propriétés particulières » sont traités dans la série des normes NF P 15-. (Zoom sur l’évolution de la désignation normative des ciments courants).

Du point de vue de la désignation des ciments courants, l’évolution des normes définissant les différents types de ciments courants s’est traduite, ces 25 dernières années,  par un net élargissement de la gamme des produits, établie sur la base d’un encadrement plus précis de leur composition. Alors qu’en France il existait 5 types de ciments courants reconnus en 1981, ce nombre est passé à 10 en 1994 suivant l’évolution de la norme NF P 15-301, pour atteindre le nombre de 27 en 2001 au moment de la parution de la norme EN 197-1 actuellement en vigueur. Le tableau ci-après résume de manière succincte cette évolution. On peut également souligner une exigence accrue concernant les caractéristiques physico-chimiques et minéralogiques en fonction de la nature des différents constituants autorisés (clinker, laitier de haut-fourneau, cendres volantes, fillers, fumée de silice, pouzzolanes…).

Si les types de ciments courants répondent à des compositions bien déterminées, leur classification est toujours fonction de leurs résistances mécaniques qui sont réparties dans la norme européenne en 6 classes de résistances, étagées entre les classes 32,5 N et 52,5 R.

Zoom sur l’évolution de la désignation normative des ciments courants

1981
(NF P 15-301)

1994
(NF P 15-301)

2001
(NF EN 197-1)

Ciment Portland Artificiel (C.P.A)

CPA-CEM I

CEM I

Ciment Portland Composé (C.P.J)

CPJ-CEM II/A et CPJ-CEM II/B

CEM II/A-S et CEM II/B-S
CEM II/A-D
CEM II/A-P et CEM II/B-P
CEM II/A-Q et CEM II/B-Q
CEM II/A-V et CEM II/B-V
CEM II/A-W et CEM II/B-W
CEM II/A-T et CEM II/B-T
CEM II/A-L et CEM II/B-L
CEM II/A-LL et CEM II/B-LL
CEM II/A-M et CEM II/B-M

Ciment de haut fourneau (C.H.F)

Ciment de haut fourneau

CHF-CEM III/A CHF-CEM III/B
CLK-CEM III/C

CEM III/A, CEM III/B
CEM III/C

Ciment de laitier au clinker (C.L.K)

 Ciment pouzzolanique
CPZ CEM IV/A et CPZ CEM IV/B

CEM IV/A et CEM IV/B

Ciment au laitier et aux cendres (C.L.C)

CLC CEM V/A et CLC CEM V/B

Ciment composé
CEM V/A et CEM V/B

S : laitier, D : fumée de silice, P : pouzzolane naturelle, Q : pouzzolane naturelle calcinée, V : cendre volante siliceuse,
W : cendre volante calcique, T : schiste calciné, L et LL : fillers calcaires, M : constituant principal autre que le clinker