L’architecture traditionnelle est étonnamment diverse. Elle est nécessairement originale parce qu’elle naît du sol même et des ressources de la région où elle se développe, tout en s’adaptant à l’ensemble de ses contraintes. Erigée au carrefour de la nature et de la culture, l’architecture traditionnelle semble être l’expression culturelle naturelle de son environnement. Elle est selon l’expression de Philippe Guillou « une véritable frontière de géographie humaine » (Cultures et habitats. Douze contributions à une ethnologie de la maison, L’Harmattan, 1999).
Cette culture n’est pas seulement une culture de la forme, c’est également une culture de la fonction, des moyens et de l’art. L’architecture vernaculaire est donc « une science du concret » (Levi Strauss, La pensée sauvage ) et une science du complexe, dont les savants sont des générations d’artisans anonymes et silencieux. Mais leurs réalisations parlent pour eux, et ceux que le concept de développement durable intéresse peuvent méditer utilement leurs témoignages bâtis.
Par définition, presque, le bâti vernaculaire est durable… sinon, il ne nous serait pas parvenu. Mais s’il est durable au sens de la longévité, il l’est également au sens de la soutenabilité car il est fondé sur une économie de moyens compatible avec un développement local équilibré (circuit court) et sur une mise en œuvre solidaire : ce sont le climat et les ressources locales qui dictent les formes, les techniques et les matériaux : bois, végétaux, terre ou terre cuite, pierre, ardoises, lauzes, le choix s’effectue ou s’impose, en fonction de la géologie et du climat.
Au-delà de cette constatation sur les matériaux, les recherches actuellement menées sur la construction écologique et bioclimatique montrent à quel point le bâti vernaculaire est élaboré si, précisément, on le place dans une logique de développement durable :
– le bâti vernaculaire gère l’humidité,
– ses matériaux constitutifs sont perméables à l’eau (liquide ou vapeur),
– il est ventilé,
– il présente généralement une bonne inertie thermique,
– il est isolé,
– sa maçonnerie ou ses techniques d’assemblages sont souples et supportent les déformations,
– enfin ses matériaux sont recyclables ou biodégradables.
Bref, les recherches qu’impose aujourd’hui la problématique de la maîtrise du développement apprennent au patrimoine vernaculaire ce qu’il sait et ce qu’il est depuis toujours : écoresponsable.